La touche étoile
La Touche étoile est le titre d’un roman de Benoîte Groult.
Une amie, qui travaille auprès des personnes âgées, me l’a fait découvrir.
Le thème de ce livre est la vieillesse… tout un programme !
Beaucoup de critiques littéraires, et de lecteurs, ont trouvé que le thème était abordé avec humour. Certes, il y a des scènes plutôt cocasses mais, en refermant le livre, j’ai tendance à ne retenir que la tragédie de devenir vieux.
Désolée mais cet état de fait (vieillir) m’insupporte. Si je lis un livre sur une maladie, je me protège en me disant que, avec un peu de chance, j’arriverai à passer à côté.
Mais la vieillesse… à moins de mourir avant, ce qui est encore plus terrible, personne n’y échappera. Rien que cette simple idée me met mal à l’aise.
Ce livre est plein d’entrain et l’histoire nous est narrée par une femme très alerte pour son âge mais…
Mais qui a envie de devenir transparent aux yeux des autres ? Personne. Pourtant Benoîte Groult nous explique que c’est ce qui arrive quand vous vieillissez.
Quand vous devenez vieux, plus personne ne vous regarde.
Vous êtes devenus transparents.
Plus un regard ne s’arrête sur votre visage, vos yeux, votre bouche ou votre démarche.
Vous êtes ignorés.
Vous êtes déjà morts… tout du moins pour la société dite “active”.
Néanmoins, malgré la gravité dont ce livre m’a remplie, il reste quelques belles phrases et beaux passages.
En voici quelques uns.
[…]Eux, les vieux, cumulent tous les âges de leur vie. Tous ceux qu’ils ont été cohabitent, sans compter ceux qu’ils auraient pu être et qui s’obstinent à venir empoisonner le présent avec leurs regrets ou leur amertume. Les vieux n’ont pas seulement soixante-dix ans, ils ont encore leurs dix ans et aussi leurs vingt ans et puis trente et puis cinquante et en prime les quatre-vingts piges qu’ils voient déjà poindre.[…]
[…] Vous êtes la première génération à avoir fait une découverte terrible en effet : ce que vous aviez de précieux et d’important à transmettre n’intéresse plus vos descendants. Quant à votre expérience, c’est bien simple, elle les fait chier. […]
Vos pères encore avaient pu jouir du respect de leurs descendants, parce qu’ils se déguisaient en vieux, se cantonnaient dans l’espace qu’on leur assignait et qu’ils laissaient la place assez vite. […]
[…] Les mots aussi nous ont été confisqués. Plus personne n’est moribond, quelle indécence ! On ne meurt plus de nos jours : on s’endort dans la paix du Seigneur ou bien on décède. Expirer évoque trop le dernier souffle. A éviter. Rendre l’âme est démodé maintenant qu’on est plus sûr d’avoir une âme… Trépasser paraît trop littéraire, alors qu’on peut dire décès en toute indifférence tant le mot a été vidé de tout pouvoir émotionnel par les administrations qui l’emploient. Dire « Ma mère est décédée hier » fait nettement moins mal que « Maman est morte ». […]