Mon miracle... Mon étoile... Ma douleur...
Les Autres, parce que tu n’étais qu’un embryon de 2 mois, parlent de fausse couche. Quand je parle de toi, et de la façon dont tu es parti, j’utilise les mêmes termes, sinon Ils ne comprendraient pas.
“Fausse couche”, quelle hideuse expression pour définir une souffrance à faire hurler…
Dés que j’ai su que tu étais là, bien au chaud dans mon ventre, j’ai tout de suite eu envie de te dire que je t’aimais. Mais comme c’était impossible, j’ai pris l’habitude de poser mes mains sur mon ventre, essayant de trouver où tu étais exactement, et j’espérais que tu comprendrais, à travers la chaleur de mes mains, tout l’amour que je te portais. J’espérais que cet amour, donné si précocement, te permettrait d’être plus fort. D’ailleurs tu l’étais : tu ne mesurais que quelques millimètres et tu avais la force de transformer mon corps.
Avec ton père, pour pouvoir parler de toi, nous t’avions trouvé un petit surnom (que je garderais à jamais au fond de moi et qui n’appartient qu’à toi). Nous t’imaginions avec nous, tu étais déjà avec nous. Dans ma tête, j’avais engagé avec toi quelques conversations secrètes.
Je te voyais dans une grenouillère jaune poussin, lové dans les bras de ton papa, calmement endormi ou attentif au moindre bruit que tu percevrais, les yeux aussi ronds que des billes pour ne rien perdre du monde qui t’entourerait.
Je t’imaginais blottir ta petite tête joufflue au creux de mon cou et tu agrippais, de ta main potelée, le doigt que je te tendais.
J’entendais ton rire cristallin qui brisait le silence et je voyais déjà tes yeux pétiller de joie à chaque nouvelle découverte que tu ferais.
Est-ce que ton premier mot serait Maman ou Papa ? Peut-être en aurais-tu choisi un autre, simplement pour nous surprendre.
Tu étais ce que j’avais de plus précieux.
Et puis tu nous a quitté, tu es parti rejoindre les étoiles…
Ton père n’a rien laissé voir de sa peine, il a mit toutes ses forces dans le réconfort qu’il tentait de m’apporter. Il m’a répété : “ ce n’est pas grave, c’est juste triste”.
Mes larmes ne m’ont pas quittées, elles sont toujours là. Parfois, quand je suis seule, je permets à quelques unes de s’échapper et, le soir, il m’arrive de te chercher entre les étoiles.
Mon corps a de nouveau changé, il est redevenu ce qu’il était ; comme si rien ne s’était passé. Maintenant mon ventre est vide, tellement vide…